« Les données satellitaires ont le pouvoir de changer tout un écosystème »

Fondatrice et PDG de la start-up Blue Sky Analytics, Abhilasha Purwar analyse l’importance de l’utilisation des données satellitaires et de l’IA dans la lutte contre le changement climatique.

Quelle est l’activité principale de votre entreprise ? 

Blue Sky Analytics utilise les données satellitaires et les ressources de l’intelligence artificielle pour développer des produits de surveillance environnementale et d’évaluation des risques climatiques. Il y a dix ans, les résolutions des satellites étaient beaucoup plus basses, l’infrastructure du cloud computing était limitée, la surveillance environnementale basée sur le cloud et les satellites était donc très difficile. Nous dépendions beaucoup plus des capteurs IoT ou de la surveillance manuelle. Grâce aux avancées technologiques dans les capteurs, les résolutions, la démocratisation de la puissance de calcul grâce à des infrastructures cloud massives, les jeunes ingénieurs indiens et les data scientists de Blue Sky Analytics ont pu accéder, traiter et modéliser d’énormes volumes de données satellitaires. Lorsque nous avons créé notre entreprise en 2019, l’IA avait beaucoup évolué dans un grand nombre de cas d’utilisation pour les marchés de la consommation, les marchés financiers, mais l’utilisation de l’IA dans l’observation de la Terre pour la surveillance environnementale n’en n’était qu’à ses débuts. Le changement climatique et la dégradation de l’environnement étant le plus grand défi auquel notre planète est confrontée, il nous a semblé évident chez Blue Sky Analytics de consacrer notre énergie à relever ce défi. Il nous a semblé évident d’utiliser toutes ces données satellitaires dans le contexte du changement climatique en nous appuyant sur les ressources de l’IA. 

Comment l’observation de la Terre peut-elle devenir un outil de lutte contre le changement climatique ?

Le changement climatique est déjà une réalité, comme le confirment chaque jour des événements extrêmes comme les sécheresses, les inondations et les incendies de forêt. L’observation de la Terre à l’aide de données satellitaires nous permet non seulement d’observer ces phénomènes, mais aussi d’apporter des solutions d’atténuation et d’adaptation. Grâce aux données satellitaires et à l’intelligence artificielle, nous avons, par exemple, réussi à constituer une base de données des incendies de forêt dans le monde, sur les émissions de gaz à effet de serre qu’ils génèrent et d’autres paramètres liés au risque, aux prévisions, à l’intensité et aux modèles. Et ce n’est pas rien : toutes les entreprises du classement Fortune 500 se sont fixé l’objectif zéro émission à l’horizon 10 ou 20 ans. Mais un grand incendie de forêt peut anéantir tous ces objectifs.

Quels sont les obstacles actuels à une utilisation plus large des ressources de l’IA dans l’observation de la Terre ?

En dépit des progrès réalisés, le changement climatique est encore perçu comme relevant des organisations non gouvernementales, d’organismes publics et d’activistes. Pourtant, les initiatives se multiplient aussi dans le secteur privé, avec, comme nous, des start-up qui ont besoin de financements pour progresser. Notre modèle économique est très efficace : des start-up comme la nôtre ont besoin d’investissements de 5 à 10 millions de dollars, une goutte d’eau par rapport aux besoins d’autres start-up. Grâce à cet apport en capital, nous pouvons offrir des niveaux de surveillance environnementale bien plus élevés qui peuvent catalyser et ouvrir la voie à un écosystème d’action pour le climat.

Où en est la technologie ?

Satellites, Big Data et IA… je pense que chez Blue Sky Analytics toute la terminologie technique à la mode est à l’honneur. Mais si nous sommes essentiellement axés sur les mathématiques fondamentales de l’ingénierie, nous utilisons des données au sol et des yeux dans le ciel pour surveiller l’évolution des ressources sur notre planète comme la qualité de l’air, la qualité de l’eau, les émissions industrielles. Ces données sont essentielles pour suivre et évaluer de nombreux projets d’atténuation et d’adaptation du climat sur la planète. Notre produit est assez développé, nous avons un tableau de bord commun dénommé SpaceTime pour tous les clients qui peut être alimenté avec 100 fois plus d’ensembles de données. Une passerelle API permet à tous nos clients d’accéder à nos ensembles de données avec seulement quelques lignes de code pour les intégrer ensuite dans leurs feuilles de calcul Excel, applications, tableaux de bord internes de l’entreprise, rapports trimestriels, etc. Cela dit, notre objectif est de simplifier notre « technologie de pointe » et de la rendre très facile à utiliser et accessible aux utilisateurs. Nous aimerions donc avoir un retour d’information actif de la part des utilisateurs dans le domaine du climat au niveau international, qu’il s’agisse des secteurs de l’assurance ou de la banque, des gestionnaires d’actifs ou des décideurs politiques, pour que nous puissions améliorer à la fois la qualité et la précision de nos ensembles de données, l’ergonomie et l’accessibilité de nos plateformes.